On peut à ce moment se risquer à le dire pour un futur proche parce que les renseignements que la population nous apporte, aux uns et aux autres, nous font entrevoir qu’Ivanoff et moi, la Légion et l’Infanterie de Marine, nous allons peut-être combattre côte à côte très prochainement. « Opex Tacaud» nous relate également, avec infiniment d’humanité et de pudeur, la fraternité des armes, les relations des soldats avec les habitants locaux, écrasés par l’insécurité et la violence, les devoirs du chef sur le terrain, le dévouement de la troupe. La réalité sur le terrain, c’est qu’il faut neutraliser ces pillards et ôter à quiconque l’envie de les imiter. Un douanier. Nous avions d’ailleurs l’habitude, au Grand Trois (3La coopération entre ma compagnie et l’escadron du REC ne posera donc aucun problème. Pour en savoir plus, nous irons demain en patrouilles ratisser le secteur entre ici et Njédaa pour chercher des indices matériels et interroger les bergers nomades que nous rencontrerons, ou des villageois s’il y a des villages. Pas de problème, mes gars ne sont ni tendus ni angoissés : même dans les travaux les plus simples, il y a plusieurs façons de demander un tournevis ou un chiffon, et j’ai l’oreille suffisamment « musicale » pour déceler les tensions contenues dans les voix. La plupart des instits tchadiens (et aussi dans les pays voisins je suppose, car les frontières administratives sont un peu théoriques dans ces pays sans administration), la plupart des instits, m’a-t-on dit, sont Hadjeraï.A Oum Hadjer, Jambon m’intéresse encore une fois : il me présente et me recommande un homme jeune, un gaillard un peu moins grand que les basketteurs américains mais avec une voix douce qui est inattendue dans une telle carcasse, un gaillard que Jambon connaît « De plus un interprète, connaissant les politesses locales, me sera utile quand nous irons patrouiller dans des coins un peu reculés, car nous serons au fin-fond de l’Afrique ex-française, regardez la carte de l’Afrique. J’ai choisi des vrais gaulois, en évitant les gars des dom-tom, parce que je sais qu’en général les Africains ne s’entendent pas bien avec ceux-ci, je ne sais pas pourquoi. Et effectivement, c’est un brave petit gars, sociable, astucieux, jamais de problème.

A ce moment, quelle importance que les accords franco-tchadiens de coopération, modifiés en 1976, contiennent désormais un  article 4 stipulant que les coopérants français (c’est nous) ne seront pas directement engagés dans des actions de combat ? Si vous avez participé à une opex, je vous suggère maintenant de l’écrire.Longtemps très minoritaires à l’intérieur de l’armée, ceux des opex ont trop peu raconté leur expérience. Marcher en changeant de formation, en ligne (côte à côte) ou en colonne (à la file indienne), en gardant des distances convenables et sans que l’arme ne soit pointée sur un voisin, sans doigt sur la gâchette, ne pose plus aucune difficulté après quelques exercices.Ces formations sont prises par chaque groupe de dix hommes et ensuite on s’occupe de la disposition des trois groupes : en triangle, groupes successifs, groupes accolés. Les maisons ont été endommagées par les canons des AML90 en tir direct, mais ailleurs le tir d’artillerie a fait peu de dégâts matériels car les obus étaient réglés « fusant», c’est-à-dire explosion instantanée à l’impact, avant que l’obus n’ait le temps de pénétrer dans le sol ou dans les toits. Le soleil n’est plus à son sommet dans le ciel et son rayonnement devient moins dangereux. De ce fait je ne manque pas de candidats.Petit problème, c’est que la Base Arrière est commandée par un officier supérieur alors que je ne suis que capitaine. J’en oublie certainement.Après notre arrivée à Abéché, cette bourgade bien placée serait donc tenue par un groupement de trois unités sous le commandement du Colonel Jean-Claude Hamel qui venait d’arriver lui aussi à N’Djaména. Aucun accident cependant.

La précision dépend du calme et de la discipline que le tireur sait s’imposer, tous les bons tireurs vous le confirmeront pendant que les mauvais tireurs ne peuvent plus rien vous dire : à Njédaa, la nervosité des frolinat leur fut fatale.La modération du tir est, elle aussi, une question de calme et de discipline : le modèle de kalachnikov en service ici est équipé, sur le côté du boîtier de culasse, d’un levier qui est un sélecteur à trois positions avec tir coup par coup, tir par rafale de trois, tir par rafale libre.

Cette loyauté des militaires envers le gouvernement issu du suffrage universel avait pendant plus de dix ans différé les espoirs de ceux qui, écartés par la démocratie en 1965, avaient cru pouvoir revenir en 1968 par l’émeute.Je remercie M. Guy de Kersabiec non seulement d’avoir accepté de participer à ce livre en rédigeant la postface, mais je le remercie aussi de sa fidélité dans les moments difficiles. Mais quand j’ai mieux connu le pays par la suite, j’ai souvent vu aussi des cavaliers, seuls ou à deux, passer à bride abattue : le Toujours est-il qu’aujourd’hui la nouvelle se propage dans le pays, qu’elle est à Ati où l’on voit les Frani tranquilles et qu’elle est en cours de diffusion dans notre zone d’intérêt : Cependant j’écoute radio-frolinat, parce que ses mensonges ne sont pas à négliger. Alors commence un tout autre aspect de la même mission : nos guerriers se transforment en humanitaires, patrouillent dans toute la région, prêts à accrocher un ennemi qui ne se montre pourtant pas, distribuent des médicaments dans les villages, rallient les hésitants et permettent à l’armée tchadienne de se reprendre.
Sans savoir quand nous serons réapprovisionnés.J’envoie le Sergent-chef Jambon faire le marché, accompagné d’une petite équipe qui portera les achats. Une petite centaine. Succédant à d’autres opérations extérieures moins lourdes qui avaient eu lieu depuis la décolonisation, l’opération Tacaud ouvrait en 1978 le chapitre des « opex » dans la longue histoire de l’Armée française. Rappelé à l’activité au début de la Première Guerre Mondiale, il fut alors nommé Gouverneur Militaire de Paris.